Jérôme Garcès : « L’arbitre est un sportif au service du jeu »

Ce n’est un secret pour personne : Jérôme Garcès est un arbitre de grand talent. Ce père de deux enfants est devenu, en juin 2010, le 5ème arbitre professionnel français. Le Béarnais a également officié lors du tournoi des Six Nations 2012 et a participé à la Coupe du Monde 2011 en tant que juge de touche. Esprit de la Règle est parvenu à l’interviewer…

« Comment avez-vous découvert l’arbitrage ? Aviez-vous déjà joué au rugby avant ?

J’ai joué au rugby avant de me lancer dans l’arbitrage, principalement dans le club d’Arudy en Fédérale 2 puis Fédérale 3. Suite à une blessure au poignet, j’ai décidé de me lancer dans l’arbitrage, mais mon but premier était simplement de connaître les règles du jeu et de rester au contact de mon sport. Mais c’est par passion pour l’arbitrage que j’ai décidé de continuer ma carrière.

Le secteur de jeu dans lequel vous vous sentez le plus à l’aise ?

Je ne parlerai pas d’un secteur de jeu mais de l’application d’une règle. Nous avons au rugby, et différemment à d’autres sports, la règle de l’avantage qui permet à l’équipe non fautive de pouvoir assurer la continuité du jeu. Pour l’arbitre, cela demande une analyse pour déterminer quand, où et comment la mettre en application sur le terrain.

Vous êtes réputé pour votre coup de sifflet multicorde. Quel sifflet utilisez-vous, et comment le maniez-vous pour réaliser ce son si modulé ? 

Il y a quelques années maintenant, lors d’un déplacement en Angleterre, j’avais découvert dans une boutique de Gloucester des sifflets métalliques, j’avais donc décidé d’en acheter un afin de faire quelques essais. Depuis, j’utilise toujours ce type de sifflet : les Acme. Ensuite, pour le coup de sifflet multicorde, un conseil : la façon de tenir le sifflet dans sa main détermine le son !

Suivez-vous un rituel particulier avant vos matchs ?

Je fais les choses dans l’ordre afin d’avoir une préparation identique sur tous les matchs. On ne peut pas parler de rituel mais plus particulièrement de façon de préparer le match.

En tant qu’arbitre, quel est selon vous l’aspect principal de la fonction ?

Pour moi, l’arbitre est un sportif au service du jeu, et comme tout sportif, la notion de plaisir est primordiale pour obtenir un résultat optimal.

Nous savons que la préparation d’un arbitre professionnel est ardue. Comment s’articule-t-elle sur les différents plans, technique, physique, etc. ?

Un arbitre de haut niveau doit avoir une condition physique optimale, dans le but d’être précis dans ses décisions, car on sait aujourd’hui que le temps de jeu effectif est de plus en plus élevé. Nous avons deux tests physiques par an mis en place par l’IRB dans le but d’évaluer notre niveau de forme, mais également un suivi annuel puisque nous sommes équipés d’un GPS sur tous les matchs arbitrés. Sur le plan technique, nous avons à notre disposition un coach avec qui nous échangeons et analysons nos performances mais avec qui nous préparons également nos matchs suivant les axes de travail que nous avons identifié sur nos performances. Nous réalisons un feed-back de notre match en détaillant tous les secteurs de jeu.

Quel est l’aspect le plus délicat à appréhender dans l’arbitrage ?

Concernant l’aspect technique, la zone de ruck nécessite une bonne analyse et expertise afin d’identifier les joueurs participant à la phase. Beaucoup de questions à se poser et une décision à prendre très rapidement, à savoir : le contest peut-il avoir lieu et le jeu continuer, ou dois-je siffler et donc arrêter le jeu ? Cette phase de jeu nécessite un bon placement, une bonne photographie de la phase, et une décision cohérente.

Les arbitres sont-ils notés dans l’exercice de leur fonction ? Descendent-ils à l’étage inférieur si les résultats ne sont pas ceux espérés ? Comment tout cela fonctionne t-il ?

Nous sommes supervisés sur tous les matchs que nous arbitrons et cette supervision permet de noter notre performance. Ensuite ces notes sont collectées par le responsable de l’arbitrage afin d’établir un classement, et donc une hiérarchie dans l’arbitrage.

Quelle pression ressentez-vous avant un match ? Comment la gérez-vous ?

Je ressens la même pression qu’un joueur à quelques minutes du coup d’envoi, à savoir l’envie de réussir. C’est donc pour moi une motivation positive. La préparation du match en amont aide à gérer ces derniers instants d’avant-match.

Un stade en France qui vous a marqué ?

Désolé, il n’est pas en France mais au Pays de Galles : le Millenium de Cardiff, simplement fabuleux !

Quel est votre meilleur souvenir en tant qu’arbitre ?

J’ai énormément de bons souvenirs, mais si je dois n’en garder qu’un, c’est mon premier match du Tournoi des Six Nations [ndr : Italie-Angleterre, le 11 février 2012].

Que conseillez-vous aux jeunes arbitres qui débutent ?

Je leur conseille d’être précis sur la règle et d’avoir une bonne analyse du jeu. Lorsque l’arbitre met tout cela en application, les joueurs sont en confiance et adhèrent à ses décisions. Et surtout de prendre du plaisir sur le terrain.

Avez-vous une anecdote à nous raconter ?

Il y a quelques années maintenant, sur un de mes premiers matchs de Top 14, je me suis rendu compte dans mon vestiaire et à quelques minutes du début du match que j’avais oublié mes drapeaux de touche. Nous avons donc été obligés de fabriquer des drapeaux avec le matériel présent dans mon vestiaire : j’avais donc coupé la barre du rideau de douche et confectionné deux drapeaux ! Mais heureusement qu’un dirigeant du club, au moment de rentrer sur le terrain, est arrivé avec deux vieux drapeaux qui ont parfaitement fait l’affaire. »

Un grand merci à Jérôme Garcès, qui nous a répondu très gentiment, et qui est venu faire un tour sur le site. Merci aussi à toutes les personnes qui nous ont aidés à le contacter, et aux lecteurs qui nous ont envoyé leurs questions. 

un commentaire

  1. simplement génial ! 😀 merci

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