[Désignations] Six Nations 2019 : dernier appel pour la Coupe du Monde

Dernière compétition officielle avant l’annonce du groupe d’arbitres retenus pour la Coupe du Monde, le Six Nations précédant cette dernière revêt, on le sait, toujours une saveur arbitrale particulière, aux accents de préparation et de réglages sur le terrain. Cette édition 2019 change quelque peu la donne et annonce sans détours que les décisions définitives ne sont pas prises.

Date Domicile Extérieur  Arbitre Nationalité
01/02/2019 France Pays de Galles Wayne Barnes ANG
02/02/2019 Écosse Italie Luke Pearce ANG
02/02/2019 Irlande Angleterre Jérôme Garcès FRA
09/02/2019 Écosse Irlande Romain Poite FRA
09/02/2019 Italie Pays de Galles Mathieu Raynal FRA
10/02/2019 Angleterre France Nigel Owens GAL
23/02/2019 France Écosse Nic Berry AUS
23/02/2019 Pays de Galles Angleterre Jaco Peyper AFS
24/02/2019 Italie Irlande Glen Jackson NZL
09/03/2019 Écosse Pays de Galles Pascal Gaüzère FRA
09/03/2019 Angleterre Italie Nic Berry AUS
10/03/2019 Irlande France Ben O’Keeffe NZL
16/03/2019 Italie France Matthew Carley ANG
16/03/2019 Pays de Galles Irlande Angus Gardner AUS
16/03/2019 Angleterre Écosse Paul Williams NZL

Les désignations de ce Tournoi laissent en effet le lecteur songeur à plus d’un titre ; beaucoup d’événements les émaillent, premier match au centre dans cette compétition pour certains, dernier pour d’autres (et quels autres !), une atmosphère de passation de pouvoir progressive s’imprègne, et se manifeste par plusieurs éléments.

Commençons par les cadors, ayant au moins une Coupe du Monde au compteur et d’ores et déjà un ticket validé (sauf tremblement de terre) pour la suivante. Trois d’entre eux terminent leur carrière en Six Nations sur cette édition 2019, et il s’agit… des trois meilleurs arbitres au monde, dans le désordre Nigel Owens, Wayne Barnes et Jérôme Garcès. Owens dirigera son dernier Crunch à Twickenham, Jérôme Garcès arbitrera Irlande / Angleterre, enfin Wayne Barnes fera disputer 80 minutes entre l’équipe de France et le Pays de Galles dans un remake très attendu. Il s’agit là de trois matchs majeurs qui leur permettront de lancer leur saison internationale 2019, ces trois désignations étaient pour le moins attendues et permettent de commencer à mesurer la perte que subira le panel dans moins d’un an.

A noter également une bonne représentation des arbitres sudistes expérimentés, tels que Jaco Peyper qui dirigera la rencontre entre le Pays de Galles et l’Angleterre pour la première fois, et Angus Gardner désigné sur Pays de Galles / Irlande ; il s’agit de deux rencontres capitales du Tournoi, confiées à des arbitres considérés parmi les tout meilleurs. Glen Jackson en revanche ne bénéficie pas de la même fortune et sera au sifflet d’un match de moindre ampleur, Italie / Irlande. On pourra certes arguer qu’il n’y a pas assez de rencontres de prestige pour tous, mais comment ne pas y voir un logique recul face à l’émergence d’arbitres de talent en Nouvelle-Zélande et ailleurs, et surtout suite à des prestations de moindre envergure, malgré l’obstination sudiste à désigner Jackson de façon dithyrambique. A l’inverse, la progression constante de Ben O’Keeffe le place en belle position sur ce Tournoi, il dirigera en effet Irlande / France et semble promis à une belle carrière.

Côté français, Pascal Gaüzère et Romain Poite bénéficient également de matchs intéressants, avec respectivement les alléchants Écosse / Pays de Galles et Écosse / Irlande. Ils se positionnent tous deux en tant que cadres du panel international et sont justement récompensés dans cette optique. Plus surprenant, Mathieu Raynal, qui prend de plus en plus d’ampleur au niveau national comme international, en témoigne sa présence systématique en Rugby Championship comme en Six Nations, dirigera un match habituellement réservé aux arbitres moins expérimentés, à savoir Italie / Pays de Galles. Ceci ne remet très vraisemblablement pas en cause sa participation à la Coupe du Monde, qui s’avèrerait plus que légitime et qu’il est largement en droit d’attendre, mais met en lumière un besoin de voir quelques nouvelles têtes aux places d’honneur, dans le but de les jauger plus précisément.

En effet, ce Tournoi des Six Nations est également clairement destiné à effectuer les dernières évaluations des forces en présence. Il a été clairement annoncé par World Rugby en la personne d’Alain Rolland que des quatorze arbitres désignés sur ce Tournoi, seuls douze seraient retenus pour la Coupe du Monde. Les quatre nouveaux arbitres à ce niveau semblent particulièrement dans le viseur.

Deux d’entre eux sont anglais : Matthew Carley et Luke Pearce ; ils ont connu des ascensions tout à fait différentes. Luke Pearce est considéré depuis plusieurs années comme un arbitre à très fort potentiel, avec une accession au panel national extrêmement précoce, et a confirmé ce potentiel de manière très progressive, jusqu’à arriver en Tier 1 à l’international en juin dernier. Carley, en revanche, qui a la particularité de diviser un peu plus, a connu une progression fulgurante qui l’a propulsé en Tier 1 voilà deux ans, sans jamais accéder ensuite à une compétition officielle. Ces deux arbitres connaîtront les joies du Six Nations au centre dès février, il est fort à parier que seul l’un d’entre eux ira à la Coupe du Monde en tant que central.

Les deux autres sont sudistes : Nic Berry et Paul Williams. Tous deux anciens joueurs, tous deux arrivés sur la scène du Super Rugby très rapidement, et tous deux débutants en Tier 1 en juin dernier également : les deux profils sont très similaires. Berry, moins expérimenté que Williams, a plus besoin d’être vu, c’est pourquoi il dirigera deux rencontre de ce Six Nations, France / Écosse et Angleterre / Italie ; Williams quant à lui arbitrera la prestigieuse Calcutta Cup. Ce dernier semble disposer d’une légère avance sur son voisin australien, mais les prestations à venir seront déterminantes. Là encore, à notre avis, seul un des deux participera à la Coupe du Monde en tant qu’arbitre central. Pronostics (orientés) de la rédaction : Luke Pearce et Nic Berry.

Un dernier mot avant de conclure pour évoquer les deux grands absents de ce panel : les deux irlandais John Lacey et Andrew Brace. Si le premier a choisi de prendre sa retraite internationale tout début décembre et ainsi ne pas participer aux prochaines échéances, le second était attendu dans la liste en tant qu’outsider et a été dépassé par les quatre retenus durant les Tests de novembre, où une blessure l’a amené à se faire remplacer pendant Italie / Nouvelle-Zélande. Nul doute qu’il intègrera durablement le panel une fois la Coupe du Monde passée.

Ainsi, il y avait beaucoup de choses à dire sur ces désignations du Tournoi. Beaucoup d’entrées au panel pour combler les sorties annoncées de la meilleure façon possible, des déceptions, des promesses également, et une belle année qui s’annonce pour quelques futurs retraités. Et, si pour la première fois depuis 2007 (a minima) les arbitres désignés pour le Six Nations ne sont pas strictement ceux qui participeront à la Coupe du Monde, l’émergence de nouveaux talents et futurs cadres du panel promet de beaux jours arbitraux.

8 Commentaires

  1. Que sont devenus Clancy et Doyle ? Retraite ?

    1. Évincés plutôt…

  2. Merci pour cette belle analyse. Par contre, je trouve Mr Gardner extrêmement clivant et loin de la rigueur des 3 grands partants, que se soit sur la discipline, la mêlée (Cf finale du Super Rugby cette année) ou les rucks.
    Une étoile filante j’espère s’il ne s’améliore pas.

    1. Sauf énorme surprise il se maintiendra en haut de l’affiche. Il y a peu de sudistes vraiment au niveau, il a un charisme important et est relativement apprécié. Je suis en revanche d’accord avec les réserves techniques que tu émets.
      Je pense qu’aujourd’hui il n’est pas encore à son maximum. Ces dernières années ont montré des arbitres avec des débuts internationaux un peu timides pour ensuite devenir incontournables : Garcès par exemple, même Barnes et Owens ont impulsé de la transformation dans leur arbitrage pour le bonifier. Gardner est encore au début de ce chemin… A lui de faire le boulot !

  3. Un pronostic pour la finale de la CDM (si on oublie les nationalités)? Pour moi, Wayne Barnes le mériterait, vu que Nigel Owens a déjà arbitré la dernière.

    1. C’est la grande question en effet. En délimitant progressivement, il est quasiment impossible de la donner à quiconque d’autre que Barnes, Owens et Garcès. Peyper, peut-être, et encore… (et Poite mais Garcès le barre).

      Une fois cette limite posée, d’accord avec toi, pas d’Owens (même si Watson en a enchaîné deux en 1999 et 2003). Ca se jouerait donc entre Barnes et Garcès… Ce sera à n’en pas douter un choix cornélien. Je la donnerais à Barnes pour sa carrière et sa longévité dingues mais c’est un déchirement envers Garcès.

  4. Chouette un nouvel article 🙂
    Encore une fois, ça à beau râler en france on prouve qu’on a un panel de qualité avec la nation la plus représenté dans le panel.
    Plein d’arbitres que je ne connais pas encore que j’ai hâte de découvrir aussi.

    1. A l’heure actuelle on est la nation numéro 1 en arbitrage. En potentiel on va sans doute passer numéro 2 derrière la Nouvelle-Zélande qui a un vivier incroyable et qui sacrifie des mecs au niveau (Briant, Pickerill) par souci de nombre…
      Ca tourne vite, mais on a eu une génération dorée. Poite a tenu la baraque seul pendant un temps, Garcès a explosé, Gaüzère est bien noté, Raynal est très bon et a de belles années devant lui (et promet énormément pour 2023, en plus). On est bien, continuons le boulot parce que ça tourne vite, des grandes nations arbitrales comme l’Irlande et l’Afrique du Sud se retrouvent dans de grosses situations de creux !

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